Nous rappelons ici la théorie sous-jacente à la profondeur de champ d’un plan perpendiculaire à l’axe optique. Il existe deux possibilités, la mise au point est faîte sur l’hyperfocale, elle est faîte avant l’hyperfocale. Nous verrons ensuite comment récupérer la partie avant la limite antérieure de netteté d’un plan perpendiculaire à l’axe optique en utilisant un plan incliné. Enfin nous vous proposerons un objet afin de vous dispenser de tous ces calculs laborieux in situ.
La mise au point à l’infini
Lorsque nous cherchons la zone de netteté la plus étendue possible, nous cherchons à gagner la netteté des objets situés à l’infini. L’infini photographique rassemble l’ensemble des objets situés à une distance supérieure à 1000 fois la longueur focale de l’objectif.
La distance de mise au point qui rend cet infini net s’appelle l’hyperfocale. La formule qui permet de la calculer est la suivante :
Où H est la distance de l’hyperfocale en mm, f est la distance focale de l’objectif, N est la netteté admissible en mm et O est l’ouverture de l’objectif.
Dans le cas des objectifs proposés régulièrement avec une chambre 4x5, en fixant N à la valeur 0, 15, nous obtenons les distances hyperfocales (en mètres) suivantes :
Lorsque nous faisons la mise au point sur la distance focale, la zone de netteté s’étend de la moitié de la distance focale à l’infini. On obtient alors les profondeurs de champs suivantes :
Pour une focale de 90 mm :
Pour une focale de 150 mm :
Pour une focale de 210mm :
Pour une focale de 300mm :
[Exercice] Supposons que nous souhaitions photographier le phare Óshólaviti à Bolungarvík avec notre chambre et notre objectif 150mm. Nous souhaiterions que le phare soit le premier élément net de la photo et que la montagne Traðarhyma à 2000 mètres derrière soit également nette. A quelle distance du phare dois-je me placer ? En faisant la mise au point sur l’hyperfocale, nous savons que l’ensemble des éléments qui sont situés derrière le phare seront nets. Aussi, nous commençons par récupérer la distance hyperfocale de notre objectif 150mm à son ouverture optimale soit f(16). L’hyperfocale étant de 9,38m, nous savons qu’à toute distance supérieure à 10 mètres (pour simplifier) respectera les critères désirés.
Mise au point sur une distance finie
Lorsque la mise au point est effectuée avant l’hyperfocale et après 20 fois la focale de l’objectif, nous pouvons calculer la limite antérieure de la profondeur de champ Pa par la formule suivante :
Où H est la distance hyperfocale, d est la distance de mise au point.
La limite postérieure de la profondeur de champ Pp est calculée par le biais de la formule suivante :
Nous en déduisons trivialement que la profondeur de champ est [Pa ; Pp], que la longueur de la profondeur de champ est Pp − Pa, que la longueur de la profondeur de champ antérieure à la mise au point est d − Pa et que la longueur de la profondeur de champ postérieure à la mise au point est Pp − d.
[Exercice] Supposons que nous souhaitions photographier la femelle plongeon catmarin qui niche à Ísafjörður. Nous nous plaçons sur la piste cyclable à une distance de 6 mètres de celle-ci avec notre chambre et un objectif de longueur focale de 300mm. Nous souhaiterions jouer sur les bokeh avant et arrière afin que seul le nid et le plongeon soient nets. Quelle ouverture devons-nous choisir pour réaliser cette photo ? Comme la distance du catmarin est bien supérieure ou égale à 20 fois la distance focale (300mm × 20 = 6000mm = 6m), nous pouvons utiliser les formules ennoncées ci-dessus. Commençons par calculer les limites antérieures et postérieures de la profondeur de champ aux différentes ouvertures :
Compte-tenu de la taille d’un plongeon catmarin, l’ouverture f(5,6) est largement suffisante. On fait ainsi la mise au point sur le cou du plongeon et nous avons ainsi une zone de netteté de 32cm avant le plongeon et une zone de netteté de 36cm après le plongeon, ce qui couvre son corps et son nid.
Nous allons introduire à présent une notion non essentielle mais qui permet de trouver plus rapidement les résultats obtenus ci-dessus, il s’agit de la dioptrique de profondeur.
La puissance P d’une distance d, notée P(d), est l’inverse de cette distance soit P(d) = 1/d. La dioptrique de profondeur Dp est la puissance de l’hyperfocale soit l’inverse de la distance hyperfocale.
L’utilité de cette notion est qu’elle permet d’obtenir très rapidement et sans tâtonnements les résultats des calculs effectués ci-dessus, et cela du simple fait que les dioptries s’additionnent ou se soustraient entre elles contrairement au distances dans les formules vues précédemment.
Pour obtenir les limites de la profondeur de champ, il suffit de procéder comme suit :
Pour obtenir la distance de mise au point à partir des limites de profondeur de champ, il suffit de procéder comme suit :
Pour obtenir l’hyperfocale à partir à partir des limites de profondeur de champ, il suffit de procéder comme suit :
Ainsi, en isolant l’ouverture dans la formule de calcul de l’hyperfocale vue précédemment, on obtient :
Nous pouvons donc calculer l’ouverture pour une profondeur de champ déterminée par le biais du calcul suivant :
[Exercice] Reprenons, l’exercice du plongeon d’Ísafjörður. Sachant que nous disposons d’une chambre 4x5, d’un objectif de longueur focale 300mm et que le plongeon se trouve à 6 mètre de nous et que nous avons opté pour une ouverture f(5,6), quelles sont les limites antérieures et postérieures de la profondeur de champ ?Nous appliquons les formules vues ci-dessus et obtenons :
[Exercice] Reprenons encore une fois le cas de notre plongeon d’Ísafjörður qui commence à se lasser de notre présence et cette fois-ci posons le problème tel qu’il se pose dans la réalité. Après avoir utilisé un télémètre, nous avons observé que la limite antérieure de la profondeur de champ est de 5,68m et que la limite postérieure de la profondeur de champ est de 6,36m. En sachant que nous disposons d’une chambre 4x5 et d’un objectif de longeur focale 300mm, quel doit être notre distance de mise au point ? Quelle doit-être notre ouverture ?Nous commençons par calculer la puissance de ces limites soit P(Da) = 5,68^−1 ≈ 0,176 et P(Dp) = 6,36^−1 ≈ 0,157. (compte tenu des limitations en HTML, X^y signifie X à la puissance y)Nous calculons ensuite la distance de mise au point :
Et la distance hyperfocale :
Nous pouvons, avec ces données, calculer l’ouverture désirée :
Nous retombons finalement sur nos pieds avec une distance de mise au point de 6m et une ouverture retenue de f(5,6).
Loi de Scheimpflug et angle de bascule
Nous allons maintenant étudier le cas d’un plan objet incliné. Nous venons de voir les conditions de netteté du plan objet perpendiculaire à l’axe optique, nous allons en faire de même pour un plan incliné. L’intérêt d’incliner le plan objet est d’obtenir une zone de netteté que nous ne pouvons pas atteindre autrement.
Il s’agit typiquement des cas où nous tentons de faire une photographie de paysage avec un premier plan qui se situe avant la zone de netteté avec une mise au point à l’infini.
La loi de Sheimpflug stipule que si le plan du film, le plan de l’objectif et le plan objet ne sont pas parallèles alors le plan objet est net si et seulement si ces trois plans se recoupent en un point.
Pour trouver la position des trois plans, nous devons déterminer deux points de l’axe de l’objet. Nous faisons la mise au point sur l’objet le plus éloigné et positionnons une marque sur le tirage et une marque de ce point sur le dépoli.
Nous faisons ensuite la mise au point sur le point le plus proche et positionnons une marque sur le tirage et une marque sur le dépoli. Nous reportons ensuite la longueur du tirage Lt et la distance verticale Dv qui sépare les deux points du dépoli.
Robert E. Wheeler (dans Robert E. Wheeler, Notes on View Camera Geometry, 8 mai 2003.) nous apprend à travers sa Wheeler’s rules qu’en dehors d’un contexte de macrophotographie, l’angle θ de bascule se calcule comme suit :
Si la chambre ne présente pas d’échelle d’angle de bascule, nous pouvons alors utiliser la formule suivante qui exprime la distance ∆ qui sépare l’extrémité du chariot porte-objectif avec l’axe de bascule en fonction de la taille de la taille T du porte-objectif :
Si vous utilisez le calculateur d’angle de Rodenstock et que vous chercher la distance ∆ à partir de l’angle θ de bascule, il faut effectuer le calcul suivant :
Calculateur d’angle de Rodenstock
Si vous trouvez ces calculs laborieux, vous pouvez investir dans la calculateur d’angle de Rodenstock qui calculera pour vous la profondeur de champs et l’angle de bascule pour des capteurs ou dos de 35mm au 8x10. Voici à quoi il ressemble :
D’un côté, vous trouverez – après réglages – la profondeur de champ selon un plan perpendiculaire à l’axe optique et de l’autre côté de l’objet, vous trouverez – après réglages – l’angle de bascule. La notice explique simplement comment obtenir les résultats.